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11 juillet 2016 1 11 /07 /juillet /2016 06:10

Une matinale inhabituelle samedi dernier sur F-Inter, un juriste en Droit du travail décrypte les enjeux du projet de Loi travail.

https://www.franceinter.fr/emissions/l-invite-du-week-end/l-invite-du-week-end-09-juillet-2016

Pascal Lokiec, professeur de droit à l'université Paris-Ouest-Nanterre - La Défense : "Il faut simplifier le code du travail, cette réforme ne simplifie rien"

Page spéciale de l'Humanité sur la loi travail

Page spéciale de l'Humanité sur la loi travail

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10 juillet 2016 7 10 /07 /juillet /2016 12:27
Affiche festival de Douarnenez du 19 au 27 août 2016 - Peuples de Turquie

Affiche festival de Douarnenez du 19 au 27 août 2016 - Peuples de Turquie

Cette année, les Turquies sont à l’honneur. Du 19 au 27 août, vous pourrez venir profiter de 9 jours de festivités à la découverte de la mosaïque culturelle des peuples de Turquie .

Au programme : 150 films dans 4 lieux de projection, une sélection de films et un festival dédié aux enfants, des expositions photographiques et pluridisciplinaires, un salon d’images expérimentales, un dôme d’écoutes radiophoniques, des concerts, une librairie fournie, un stage littérature et une belle soirée de clôture.

Tout ceci quasiment entièrement accessible aux Sourds, au sein d’un village éphémère, festif et convivial autour du chapiteau, des bars et de la restauration du Festival.

Pour découvrir les invités et la programmation de cette 39e édition vous pouvez suivre le festival de cinéma de Douarnenez sur les réseaux sociaux ici >>> Facebook , ou là >>> Twitter.

Le Festival de cinéma du monde de Douarnenez du 19 au 27 août dédié aux Peuples de Turquie
Le Festival de cinéma du monde de Douarnenez du 19 au 27 août dédié aux Peuples de Turquie
Le Festival de cinéma du monde de Douarnenez du 19 au 27 août dédié aux Peuples de Turquie
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10 juillet 2016 7 10 /07 /juillet /2016 07:45
Université d'été du PCF - 26, 27, 28 août à Angers

Une dizaine de militants finistériens se rendront cette année à l'Université du PCF à la fin du mois d'août. 5 sont déjà inscrits: Ismaël Dupont, Jacqueline Héré, Erwan Rivoalan, Dominique Gontier, Jeannine Daniel. Adhérents du PCF en Finistère, n'hésitez pas à vous inscrire. Ce moment de fraternité, de débats, de formation, est passionnant.

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10 juillet 2016 7 10 /07 /juillet /2016 07:33
Daniel Ravasio, Serge Bazin, Jean-Luc Le Calvez, Serge Puil devant la mairie de Morlaix, avec la grande consultation citoyenne "Que demande le peuple?"

Daniel Ravasio, Serge Bazin, Jean-Luc Le Calvez, Serge Puil devant la mairie de Morlaix, avec la grande consultation citoyenne "Que demande le peuple?"

QUE DEMANDE LE PEUPLE?

Vous en avez assez de voir la parole populaire méprisée, ignorée, trahie. Vous voulez être entendus. Vos exigences, exprimées et rassemblées doivent former un mandat populaire incontournable. Sans vous, rien ne se fera. A vous d’écrire la politique. A vous la parole. Les communistes viendront vous voir pour recueillir votre opinion et vous engager dans la Grande consultation citoyenne. Celle-ci traduira la volonté populaire. Parallèlement, le PCF lance un appel pour que, d'ici octobre, le peuple écrive un Pacte d'engagements communs et départage par des primaires-votations citoyennes, ceux qui seraient en accord pour le porter à l'élection présidentielle de 2017.

Vous pouvez télécharger le questionnaire pour le remplir ou le faire remplir avant de nous le retourner ( par la poste à l'adresse indiquée ou scané par mail à pcf@pcf.fr ) Vous pouvez aussi remplir le questionnaire directement par internet sur le sitewww.lagrandeconsultationcitoyenne.fr

Le PCF Morlaix était samedi sur le marché de Morlaix pour faire remplir le questionnaire "Que demande le peuple?", distribuer un tract et vendre des vignettes de la fête de l'Huma Paris/ La Courneuve des 9,10,11 septembre. Il sera aussi sur le marché de Morlaix le samedi 20 août.

150 questionnaires environ ont déjà été dépouillés dans la section. Nous nous sommes fixés un objectif d'au moins 300 questionnaires remplis sachant qu'au niveau national le PCF cherche à faire remplir 500 000 questionnaires pour que les citoyens puissent s'exprimer largement avant 2017 et pas simplement supporter un candidat qui se voudrait le sauveur suprême, avec les résultats que l'on sait...

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10 juillet 2016 7 10 /07 /juillet /2016 07:00

Nous étions le vendredi 8 juillet à Lanester pour une soirée de préparation de la fête de l'Huma Bretagne avec quatre autres représentants de la fédé PCF du Finistère.

L'édition 2016 de la Fête de l'Huma Bretagne sera la 25 ème.

Y seront particulièrement célébrés et fêtés les 80 ans du Front Populaire.

Au niveau des concerts, l'invité vedette sera Sanseverino, le dimanche. Mais il y aura aussi très certainement "Alambic electric", "L'usine à canard", "les apéros", la compagnie "Jolie Môme"...

Au niveau des débats, sont d'ores et déjà annoncés:

- Un débat sur les grands projets... inutiles ou pas?

- Un débat sur les luttes sociales, la citoyenneté, les élections. Bernard Thibault, Julian Mishi sont invités, Clémentine Autain, Olivier Dartigolles sont pressentis.

- Un débat sur l'identité bretonne, culturelle et politique, l'avenir de la culture bretonne avec Georges Cadiou et Erik Marchand

- Un débat sur les questions du féminisme organisé par la JC

- Un débat de l'atelier régional santé

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10 juillet 2016 7 10 /07 /juillet /2016 06:56
Matteo Renzi

Matteo Renzi

« La gauche pour moi c’est Tony Blair, Bill Clinton, Barack Obama. Je représente une troisième voie, joyeuse, pas une gauche maximaliste et incapable de gagner ne serait-ce que dans une assemblée de copropriétaires » (Matteo Renzi)

En Italie, une réforme de l’emploi qui institutionnalise la précarité - Le Monde Diplomatique, juillet 2016

« Jobs Act », le grand bluff de Matteo Renzi

Défait à Rome et à Turin par le Mouvement 5 étoiles — une formation qui se revendique « antisystème » —, le Parti démocrate du président du conseil italien Matteo Renzi sort affaibli des élections municipales du 19 juin. À croire que sa réforme du marché du travail, le fameux « Jobs Act », a davantage séduit les médias, les milieux patronaux et les sociaux-libéraux européens que les électeurs italiens…

par Andrea Fumagalli

Le président du conseil italien Matteo Renzi aime à se présenter comme un dirigeant politique moderne et innovant. Ainsi, sa réforme du marché du travail aurait libéré le pays de ses archaïsmes et fait baisser le chômage. Connues sous le nom de « Jobs Act », les mesures adoptées par son gouvernement pour relancer l’emploi n’ont pourtant fait que pousser plus loin encore la logique des vieilles recettes libérales.

La flexibilisation du marché du travail italien a débuté en 1983, quand les partenaires sociaux (fédérations syndicales, patronat et ministère du travail) ont signé l’accord Scotti. En plus de limiter

l’indexation des salaires sur les prix, ce texte introduisit le premier contrat atypique, à durée déterminée et destiné aux jeunes : le « contrat de formation et de travail ». Depuis, de nombreuses lois ont élargi l’éventail des contrats disponibles, si bien qu’il en existe aujourd’hui près de quarante. En 1997, la loi Treu a légalisé le travail temporaire ; en 2003, la réforme Biagi-Maroni a inventé le contrat de sous-traitance. En 2008 a été mis en place le système desvouchers, ces « bons de travail » d’une valeur de 10 euros brut de l’heure surtout utilisés dans les secteurs peu ou pas qualifiés. La diversification des types de contrat s’est accompagnée de mesures visant à accroître le pouvoir des employeurs. Parmi les plus récentes, la loi dite du « travail lié » (collegato lavoro), votée en 2010, limite les possibilités pour les salariés de recourir à la justice en cas d’abus patronal ; et la loi Fornero (2012) facilite les licenciements individuels pour raisons économiques.

Les réformes mises en œuvre par M. Renzi en 2014 et 2015 s’inscrivent dans la continuité de cette histoire, et peut-être l’achèveront-elles, tant elles ont institutionnalisé la précarité. Ainsi, le contrat à durée indéterminée (CDI) « à protection croissante », entré en vigueur en 2015, n’a pas grand-chose de pérenne ni de protecteur. Au cours des trois premières années, les employeurs peuvent y mettre fin

e président du conseil italien Matteo Renzi aime à se présenter comme un dirigeant politique moderne et innovant. Ainsi, sa réforme du marché du travail aurait libéré le pays de ses archaïsmes et fait baisser le chômage. Connues sous le nom de « Jobs Act », les mesures adoptées par son gouvernement pour relancer l’emploi n’ont pourtant fait que pousser plus loin encore la logique des vieilles recettes libérales.

La flexibilisation du marché du travail italien a débuté en 1983, quand les partenaires sociaux (fédérations syndicales, patronat et ministère du travail) ont signé l’accord Scotti (1). En plus de limiter l’indexation des salaires sur les prix, ce texte introduisit le premier contrat atypique, à durée déterminée et destiné aux jeunes : le « contrat de formation et de travail ». Depuis, de nombreuses lois ont élargi l’éventail des contrats disponibles, si bien qu’il en existe aujourd’hui près de quarante. En 1997, la loi Treu a légalisé le travail temporaire ; en 2003, la réforme Biagi-Maroni a inventé le contrat de sous-traitance. En 2008 a été mis en place le système desvouchers, ces « bons de travail » d’une valeur de 10 euros brut de l’heure surtout utilisés dans les secteurs peu ou pas qualifiés. La diversification des types de contrat s’est accompagnée de mesures visant à accroître le pouvoir des employeurs. Parmi les plus récentes, la loi dite du « travail lié » (collegato lavoro), votée en 2010, limite les possibilités pour les salariés de recourir à la justice en cas d’abus patronal ; et la loi Fornero (2012) facilite les licenciements individuels pour raisons économiques.

Les réformes mises en œuvre par M. Renzi en 2014 et 2015 s’inscrivent dans la continuité de cette histoire, et peut-être l’achèveront-elles, tant elles ont institutionnalisé la précarité. Ainsi, le contrat à durée indéterminée (CDI) « à protection croissante », entré en vigueur en 2015, n’a pas grand-chose de pérenne ni de protecteur. Au cours des trois premières années, les employeurs peuvent y mettre fin à tout moment et sans motivation. Leur seule obligation est de verser au salarié licencié une indemnité proportionnelle à son ancienneté. L’emblématique article 18 du statut des travailleurs (2), qui oblige à motiver tout licenciement individuel par une « juste cause » (faute grave, vol, absentéisme…), se retrouve ainsi mis entre parenthèses pendant trente-six mois. La formule rappelle le contrat première embauche (CPE) imaginé par le premier ministre français Dominique de Villepin en 2006, sauf que le dispositif italien ne se limite pas aux moins de 26 ans, mais concerne l’ensemble de la main-d’œuvre.

Le gouvernement Renzi a également déréglementé l’usage des contrats à durée déterminée (CDD). Depuis mars 2014, la loi Poletti — du nom du ministre du travail Giuliano Poletti — permet aux employeurs d’y recourir sans avoir à se justifier et de les renouveler jusqu’à cinq fois sans période de carence. Cette limitation est de surcroît théorique : elle ne s’applique pas aux personnes, mais aux postes de travail. Il suffit donc de modifier sur le papier une fiche de poste pour condamner un salarié au travail instable à vie.

Dans ces conditions, pourquoi des entreprises choisiraient-elles des CDI à « protection croissante » plutôt qu’une succession de CDD ? La réponse est simple : par intérêt financier. Le gouvernement Renzi a en effet mis en place des incitations fiscales qui permettaient, pour tous les CDI signés en 2015, d’économiser jusqu’à 8 000 euros par an. Austérité oblige, ce dispositif très coûteux pour l’État a été revu à la baisse par la loi de stabilité 2016, et les gains possibles pour les employeurs s’établissent désormais à 3 300 euros. Le Jobs Act a donc créé un effet d’aubaine : faire signer un contrat « à protection croissante », puis licencier son salarié sans justification, devient plus rentable que de recourir à un CDD. Grossière entourloupe statistique, le basculement des CDD vers les CDI permet de gonfler artificiellement les chiffres de l’emploi dit « stable », alors même que la précarité continue d’augmenter.

Les réformes de M. Renzi n’ont pas déclenché de grèves ou de manifestations comparables au mouvement contre la loi El Khomri en France. Contrairement à sa voisine, l’Italie n’a pas de salaire minimum, sauf pour les professions couvertes par des conventions collectives, qui protègent un nombre toujours plus faible de travailleurs (moins de 50 % aujourd’hui). Par ailleurs, le « principe de faveur » n’y existe pas : rien n’oblige les accords d’entreprise à proposer des conditions plus avantageuses pour les salariés que les accords de branche, qui, eux-mêmes, ne sont pas nécessairement plus favorables que le code du travail (3). Les employés sont ainsi très vulnérables au chantage de leur patron. Le pays n’a pas non plus d’équivalent du revenu de solidarité active (RSA), même sous condition de réinsertion professionnelle. Les amortisseurs sociaux sont surtout pensés pour le salarié en CDI ; la masse des nouveaux précaires s’en trouve exclue. Conjuguée à la crise économique, à la faiblesse des syndicats, à la stagnation des revenus et au renforcement du contrôle patronal — le Jobs Act autorise certaines techniques de contrôle à distance des salariés, au risque de porter atteinte à leur vie privée —, cette situation explique la faible résistance rencontrée par les récentes mesures.

Plus de 40 % des jeunes au chômage

Afin de défendre leurs réformes, M. Renzi et ses ministres se sont retranchés derrière les mêmes arguments que leurs prédécesseurs à Rome et que leurs homologues conservateurs en Allemagne ou socialistes en France : l’« assouplissement » du code du travail serait une condition nécessaire (et suffisante) pour construire une économie moderne et faire baisser le chômage, en particulier celui des jeunes. « L’article 18 date des années 1970, et la gauche ne l’avait alors même pas voté. Nous sommes en 2014 ; cela revient à prendre un iPhone et à demander : “Où faut-il mettre le jeton ?”, ou à prendre un appareil photo numérique et à essayer d’y mettre une pellicule », a estimé le président du conseil (4).

Le gouvernement et beaucoup de médias présentent le Jobs Act comme un succès indiscutable. « Un demi-million d’emplois en CDI créés en 2015. [L’Institut national de la statistique] démontre l’absurdité des polémiques sur le Jobs Act », claironnait M. Renzi sur Twitter le 19 janvier 2016. « Avec nous, les impôts diminuent et l’emploi augmente », écrivait-il encore le 2 mars. Il est vrai qu’en 2015, pour la première fois depuis le début de la crise économique, qui a détruit environ un million d’emplois, la courbe du chômage a été (légèrement) inversée : — 1,8 %… Cependant, cette diminution modeste s’explique surtout par le coup de pouce fiscal qui a accompagné la création du CDI « à protection croissante ». La période probatoire étant de trois ans, il faudra attendre 2018 pour dresser un bilan de ces nouveaux contrats ; mais on peut d’ores et déjà constater que la baisse des incitations financières a entraîné une contraction immédiate des créations d’emplois. Le nombre de CDI signés au premier trimestre 2016 a chuté de 77 % par rapport aux mêmes mois de l’année précédente (5).

Par ailleurs, la diminution du chômage en 2015 masque le recours exponentiel au système des vouchers, en particulier dans les secteurs peu qualifiés où les employés sont considérés comme interchangeables. En 2015, 1,38 million de personnes étaient concernées (contre 25 000 en 2008), et 115 millions de « bons » ont été vendus (contre 10 millions en 2010) (6). Logiquement, le taux de précarité a lui aussi suivi une courbe ascendante : d’après les données de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), en 2011, 43 % des jeunes Italiens se trouvaient dans une situation professionnelle instable ; en 2015, ils étaient 55 %. Dans le même temps, le taux de chômage des 15-24 ans s’est accru de dix points, pour dépasser la barre des 40 %.

L’Italie n’a pourtant pas ménagé ses efforts pour se conformer aux normes de l’économie moderne : le « degré de protection de l’emploi » — un indice imaginé par l’OCDE pour mesurer la « rigidité » du marché du travail — y a baissé d’un tiers en dix ans…

Depuis son arrivée à la présidence du conseil, M. Renzi a tout misé sur une politique de l’offre. Outre le Jobs Act, les lois de stabilité 2015 et 2016 ont planifié des baisses d’impôts pour les entreprises, une réduction des taxes sur le patrimoine, une diminution des dépenses des collectivités locales, la privatisation de certains services publics (dans le secteur des transports, de l’énergie ou des postes). Selon la philosophie qui guide ces mesures (7), l’augmentation des profits et la baisse des coûts entraîneraient automatiquement une hausse des investissements, donc de la production et de l’emploi.

Ce raisonnement est largement faux. Le chômage en Italie ne s’explique pas par les structures internes du marché du travail : il résulte avant tout de la faiblesse de la demande, car aucun entrepreneur ne se risque à augmenter sa production s’il redoute que ses marchandises ou services ne trouvent pas preneurs. Or le gouvernement Renzi n’a rien fait pour relancer la demande de manière structurelle : ni salaire minimum, ni réforme de la protection sociale en faveur des bas salaires, ni revenu garanti.

Résultat, depuis 2014, le produit intérieur brut (PIB) stagne, et le ratio dette/PIB n’est pas prêt de se réduire, puisque le dénominateur du rapport n’augmente pas.

Le Jobs Act a divisé le marché du travail en trois segments principaux, et chacun d’eux voit l’instabilité érigée en norme. Le premier regroupe les jeunes sans diplôme universitaire, qui entrent généralement dans la vie active avec des contrats d’apprentissage (peu protecteurs) et, de plus en plus, des vouchers (encore moins protecteurs). Dans le deuxième, on trouve les jeunes disposant d’un niveau de qualification moyen ou élevé (niveau licence ou master). Pour favoriser leur insertion, le gouvernement s’appuie sur le plan « Garantie jeunes ». Financé par l’Union européenne et destiné aux pays affichant un taux de chômage élevé, ce plan vise officiellement à améliorer l’« employabilité » des jeunes en leur proposant, à travers des plates-formes régionales rassemblant des entreprises privées et publiques, des « parcours d’insertion » adaptés aux besoins de ces mêmes entreprises : le service civique (gratuit), le stage (presque gratuit) et le travail bénévole. D’abord expérimenté en 2013 pour l’embauche de 700 personnes en vue de l’Exposition universelle de Milan (en plus des milliers de bénévoles), ce modèle a ensuite été transposé au niveau national (8). Il a déjà permis d’occuper 600 000 jeunes et de les faire sortir, à moindres frais, des statistiques du chômage. Enfin, pour le reste des travailleurs — c’est-à-dire les actifs de 30 ans et plus — , le CDD indéfiniment renouvelé et le CDI « à protection croissante » sont destinés à devenir les contrats standards jusqu’à l’âge de la retraite. Seuls les employés jugés efficaces, indispensables au cœur de métier de l’entreprise, seraient embauchés de manière stable et fidélisés.

Comme en témoigne le plan « Garantie jeunes », le travail gratuit, alimenté par l’« économie de la promesse (9) » qui remet toujours à plus tard l’obtention d’un emploi rémunéré et stable, devient la nouvelle frontière de la déréglementation du marché du travail italien. Les réformes de M. Renzi ont consacré le statut de précaire, lui conférant une nature à la fois structurelle et généralisée. Or le développement de la précarité figure justement parmi les premières causes de la stagnation économique de l’Italie, laquelle sert à justifier les mesures visant à accroître la précarité du travail…

Andrea Fumagalli

Professeur d’économie au département de sciences économiques et commerciales de l’université de Pavie. Auteur de La Vie mise au travail. Nouvelles formes du capitalisme cognitif, Eterotopia France, Paris, 2015.

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10 juillet 2016 7 10 /07 /juillet /2016 06:36
Photo d’archives de la grève des mineurs de 1948 dans le Nord-Pas-de-Calais © Maxppp

Photo d’archives de la grève des mineurs de 1948 dans le Nord-Pas-de-Calais © Maxppp

Situation des mineurs grévistes de 1948 et 1952

J’ai sollicité à plusieurs reprises le Gouvernement sur l’injustice subie par les mineurs grévistes de 1948 et 1952.
J’ai dénoncé notamment le terrorisme d’État et la répression brutale de la grève de 1948 qui a compté 340.000 mineurs dans toute la France. Plus qu’une grève, c’est bien une guerre des classes qui s’est déroulée tant la répression a été féroce, avec un appel à l’armée pour casser les piquets de grève et occuper les puits. Les forces de l’ordre étaient alors autorisées à tirer sur les mineurs, faisant des milliers de blessés et des dizaines de morts. Au total, 3 000 mineurs furent licenciés et leurs vies irrémédiablement bouleversées.

Il aura fallu attendre plus de 65 ans pour que l’État reconnaisse enfin «le caractère discriminatoire et abusif du licenciement pour faits de grève des mineurs grévistes en 1942 et 1952». Pourtant, depuis le départ de Mme Taubira, la situation est bloquée et les mineurs toujours vivants ne reçoivent plus de réponse de l’État.

Devant tant d’inertie, nous venons de saisir le Ministre de la Justice avec mes collègues parlementaires du Front de Gauche de la région.

Alors que des propos honteux ont récemment comparé la CGT à une organisation terroriste, alors que des syndicalistes risquent la prison ferme pour avoir défendu leur usine et leurs emplois face à une multinationale et à des patrons voyous, alors que les menaces d’interdiction planent sur les manifestations, je ne peux tolérer que les mineurs qui ont vécu avec l’injustice et le déshonneur pendant près de 70 ans continuent à voir l’État piétiner leurs droits. Il est temps que ceux qui luttent soient considérés autrement que comme des parias ou des criminels dans ce pays.

Le député PCF - Front de Gauche Jean-Jacques Candelier se bat pour la reconnaissance des violences de classe de la représsion d'Etat contre les mineurs du Nord en 1948 et 1952
Le député PCF - Front de Gauche Jean-Jacques Candelier se bat pour la reconnaissance des violences de classe de la représsion d'Etat contre les mineurs du Nord en 1948 et 1952
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10 juillet 2016 7 10 /07 /juillet /2016 06:06
Etats-Unis: pourquoi les policiers qui tuent des afro-américains ne sont (presque) jamais condamnés? - France TV Info

Deux affaires macabres relancent le débat sur les violences policières aux Etats-Unis. Une enquête fédérale a été ouverte après la mort d’un homme noir à Bâton-Rouge (Louisiane), abattu par un policier blanc, mardi 5 juillet. Alton Sterling, un vendeur ambulant, a été maîtrisé et plaqué au sol par deux policiers. Alors qu’il semble immobilisé, il est abattu par balle. Une scène filmée en direct et diffusée sur les réseaux sociaux.

Le lendemain, un autre homme afro-américain meurt sous les balles de la police, à Saint Paul (Minnesota) lors d’un contrôle d’identité, apparemment banal. Présente dans le véhicule au moment du drame, sa compagne a filmé les minutes qui ont suivi les tirs. "S'il vous plaît, ne me dites pas que mon petit ami est mort", implore la jeune femme à ses côtés. Ces histoires sordides ont suscité une vive émotion aux Etats-Unis. Une nouvelle fois des hommes noirs sont tués par des policiers blancs.

Une longue liste de relaxés

Depuis la mort de Michael Brown, en août 2014, qui avait provoqué

de violentes émeutes à Ferguson (Missouri), de nombreux cas de décès lors de contrôles de police ont été dénoncés par la presse. Le Guardian (en anglais)tient même à jour une base de donnée fournie. Dans une grande majorité des cas, les policiers s’en sont sortis sans peine de prison. Darren Wilson, le meurtrier de Michael Brown, n’a pas été inculpé. Les deux officiers qui ont tué Ezell Ford, à Los Angeles deux jours après, non plus. La justice a aussi relaxé trois des policiers accusés d'homicide involontaire, d'assaut et de négligence criminelle après que le corps de Freddy Gray, un Afro-Américain de 25 ans, a été retrouvé dans leur fourgon, le 19 avril 2015 à Baltimore (Maryland). Difficile de dresser une liste exhaustive, tant elle est longue.

L’officier Michael Slager a tout de même été placé en prison, où il attend son procès. Il est accusé d’avoir tué Walter Scott, un cariste de 50 ans, à North Charleston (Caroline du Sud) d’une balle dans le dos et d’avoir menti en affirmant que la victime lui avait pris son taser des mains et qu’il se sentait physiquement menacé. Une version contredite par une vidéo, qui montre le policier déposer à côté du corps de Walter Scott ce qui ressemble à un taser pour accréditer sa version, comme l’explique Libération. Michael Slager faisait déjà l’objet de deux plaintes pour l’usage injustifié d’un taser.

Une jurisprudence favorable pour la police

Pourquoi faut-il de tels éléments à charge pour qu’un policier puisse être inquiété ? La justice américaine repose en grande partie sur des jurisprudences et certaines d’entre elles protègent les policiers. Exemple avec ce jugement rendu par la Cour Suprême (en anglais), la plus haute instance du pouvoir judiciaire aux Etats-Unis, dans l’affaire “Plumhoff versus Rickard”, deux mois avant que Michael Brown ne soit abattu.

Comme l’explique Slate (en anglais), les plaignants réclamaient des réparations après la mort d’un conducteur et du passager d’une voiture sous les balles de la police, lors d’une course-poursuite. La Cour suprême avait affirmé, par 9 voix contre 0, qu’il ne s’agissait pas d’un recours excessif à la force. "Si tirer sur un suspect est justifié pour mettre un terme à une grave menace à l’ordre public, alors les policiers ne sont pas obligés d’arrêter de tirer tant que la menace n’a pas disparu", écrit la haute cour.

Ce texte complète un autre jugement de la Cour suprême datant de 1989, à propos de l’affaire "Graham vs Connor". Selon elle, la pertinence de l’utilisation de la force par les agents "doit être jugée du point de vue d’un policier présent sur la scène", plutôt qu’à froid par les enquêteurs. Cette norme est conçue pour prendre en compte le fait que les agents de police doivent fréquemment prendre des décisions en une fraction de seconde sur le terrain, explique PBS (en anglais). Cette décision, qui donne énormément de crédit à l’argumentation du policier, a été par exemple citée par la justice pour justifier l'abandon des poursuites contre Darren Wilson , l’officier qui a tué Michael Brown.

Un Noir a cinq fois plus de risques qu'un Blanc de mourir sous les balles de la police

Ces dispositions juridiques n’expliquent cependant pas le fait que ce sont très souvent des Afro-Américains qui meurent sous les balles des policiers. Les hommes noirs âgés de 15 à 34 ans ne constituent que 2% de la population américaine. Pourtant, ils représentent 15% des personnes tuées par la police en 2015. Ce qui fait dire au Guardian (en anglais), qu’un jeune Noir a cinq fois plus de chance de mourir sous les balles des forces de l’ordre qu’un jeune Blanc.

Selon le magazine Reason (en anglais), dont la ligne est pourtant libertarienne donc assez à droite sur l’échiquier américain, le problème vient de la pression des électeurs, qui force les pouvoirs publics à prôner une répression trop sévère des petits délits. Les autorités "refusent de reconnaître que l’application extrêmement stricte de lois parfois absurdes comme celles sur la vente de cigarettes ou la consommation de drogues légères, dont sont disproportionnellement victimes les pauvres et les minorités, contribue à la série de violences policières."

Une position partagée par Ta-Nehisi Coates, un journaliste et écrivain américain, remarqué pour son bestseller Une Colère noire (Editions Autrement, 2016), dans lequel il dénonce les traces de l'esclavage encore perceptibles dans la société américaine. "Le vrai problème est la croyance que nos problèmes de société peuvent être résolus par la force, écrit-il dansThe Atlantic, un journal positionné à gauche. À un moment donné les Américains ont décidé que la meilleure réponse à chaque problème social se trouve dans le système de justice criminelle (...) Les Afro-Américains, pendant une grande partie de leur histoire, ont vécu sous le joug de ce système de justice criminelle."

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10 juillet 2016 7 10 /07 /juillet /2016 06:00
Les soeurs Papin, esclaves aux mains sales (les séries d'été de l'Humanité, Marie Barbier: sur un crime de classe et un procès retentissant de 1933)

Les sœurs Papin, « esclaves » aux mains sales

Les séries d'été de L'Humanité

MARIE BARBIER

MERCREDI, 6 JUILLET, 2016

L'HUMANITÉ

Nos grands proçès. 1933 Christine et Léa ont sauvagement assassiné leurs patronnes. Dans un article resté célèbre, l’Humanité dénonce les « sept ans d’esclavage » qui ont précédé ce « crime de classe » et prend la défense des deux bonnes.

Crime social, crime sexuel, crime psychiatrique ? L’affaire Papin fit couler beaucoup d’encre et tourner beaucoup de bobines. Jean Genet, Claude Chabrol et Jean-Pierre Denis la racontèrent dans les Bonnes (1947), la Cérémonie (1995) et les Blessures assassines (2000). Elle fascina les surréalistes, les existentialistes et même un jeune interne des hôpitaux de la Seine, Jacques Lacan, qui développa grâce à elle le thème de la psychose paranoïaque…

Les faits sont les suivants : le 2 février 1933, Christine Papin, 28 ans, et sa sœur Léa, 22 ans, domestiques dans une famille bourgeoise du Mans depuis sept ans, tuent sauvagement leurs patronnes. Mme Lancelin et sa fille Geneviève, 21 ans, étaient rentrées chez elles vers 17 h 30. « Christine fit remarquer à sa patronne qu’un fer à repasser électrique était pour l’énième fois détraqué, raconte l’Humanité le 29 septembre 1933 à l’ouverture du procès des deux sœurs. Cela n’eut pas le don de plaire à la parfaite bourgeoise qu’était la notairesse, qui fit mine de lever la main sur Christine. Mal lui en a pris, cette dernière se défendit en attaquant, armée d’un pichet, elle frappa, et comme la fille de la patronne venait au secours de la mère, la sœur de Christine, Léa, défendit sa sœur en danger. Les deux patronnes furent rapidement hors de combat et les deux sœurs, en proie à un accès de fureur folle, les achevèrent à coups de couteau et de marteau. Après quoi, Léa et Christine allèrent se laver, se déshabillèrent et se mirent au lit, où la police vint les arrêter. » Le journaliste de l’Humanité épargne ses lecteurs : la réalité est encore plus sordide. Les deux patronnes furent énucléées, frappées à coups de marteau et de couteau et ciselées comme des lapins prêts à cuire. Les plus cyniques diront que, jusqu’au bout, les sœurs Papin auront été des cuisinières modèles. Évidemment, le fait qu’elles soient retrouvées nues et enlacées dans le même lit décupla l’intérêt que la presse à scandale portait au meurtre…

D’une aussi courte durée, le procès évoque à peine la vie des deux sœurs

Près de huit mois après les faits, le procès des deux sœurs est incroyablement court (treize heures). « Après six mois d’instruction, la police n’a pas pu ou plutôt n’a pas voulu rechercher les causes exactes de ce drame », dénonce l’Humanité. Le ou la journaliste (les articles ne sont pas signés à l’époque) opte clairement pour un crime social : « Les véritables raisons de ce meurtre, on peut les chercher dans l’enfer que vivaient ces deux “domestiques” dans cette famille bourgeoise. Oh ! Non pas qu’elles soient mal nourries ou mal logées, mais plutôt les vexations, les rabaissements que chaque jour leur faisaient subir les patrons, et la patronne en particulier. (…) Et il y avait sept ans que la vie d’esclave durait. Trouvez-vous étonnant qu’à la suite d’une dernière menace, toute la rancœur, toute la haine que l’imbécile bourgeoise avait accumulées au cœur de ses servantes aient tout à coup explosé avec une rage folle ? Certes, il ne s’agit pas ici d’approuver le geste des deux sœurs, mais de l’expliquer, de montrer comment ces servantes modèles quant à leur travail en sont arrivées à cette absurde extrémité. » Et le ou la journaliste de conclure : « Ce procès ne devrait pas être celui des sœurs Papin toutes seules, mais aussi celui de la sacro-sainte famille bourgeoise au sein de laquelle se développent et fleurissent, quand ce n’est pas les pires turpitudes, la méchanceté et le mépris pour ceux qui gagnent leur vie à la servir. »

D’une aussi courte durée, le procès évoque à peine la vie des deux sœurs. Pour Christine, « “éducation” reçue dans un dur orphelinat du “bon pasteur”, ensuite sept ans de vie de “bonne” avec des patronnes hautaines et méchantes, pour qui une bonne, même modèle, ça n’est fait que pour obéir aux moindres désirs de “madame” », dénonce encore l’Humanité. Le cocktail est explosif : « Éducations défectueuses, vies renfermées, haine latente mais profonde, détraquement cérébral et c’est soudain le drame féroce, sadique, le double crime qui a fait frémir toutes les bourgeoises du Mans. »

Durant toute l’audience, les deux sœurs restent muettes : « Malgré les appels du président, Christine ne répond que de la tête, affirmativement ou pour nier. » Les psychiatres ? « Elles ne présentent pas de tares », assurent-ils à l’audience, et sont « totalement responsables ».

Après une brève bataille d’experts psychiatres (lire ci-dessous), le verdict tombe : Christine Papin est « condamnée à avoir la tête tranchée sur la place du Mans ». « Ainsi, la justice bourgeoise a rendu son arrêt terrible après un réquisitoire forcené, féroce – un réquisitoire de bourgeois haineux, un réquisitoire de classe – du procureur Riegert, dont nous rappelons la phrase typique : “Pas de pathologie dans cette affaire ! De la psychologie simplement. Ce sont des chiennes hargneuses qui mordent la main quand on ne les caresse plus.” Et c’est bien le langage féroce d’un bourgeois pour qui les exploités sont des chiens que l’on doit cingler à coups de fouet. (…) Quant aux caresses dont parle M. Riegert, les jeunes exploitées des places bourgeoises savent ce que cela veut dire et qui est une exploitation de plus. »

Et l’Humanité de conclure dans une internationale féministe des bonnes : « Que les dizaines de milliers de “petites bonnes”, partie de la jeunesse exploitée, viennent aux côtés de leurs sœurs des usines et des bureaux à l’action pour la défense de leur revendication, pour leur émancipation totale. »

Dans l’Humanité du 30 septembre 1933

« Puis, le docteur Schutzen Berger, médecin en chef des asiles de la Sarthe, vient affirmer qu’elles ne présentent pas de traces de tares. “Elle nous parle à la troisième personne, en bonne bien stylée”, commente-t-il. M. le docteur voit-il donc dans cette habitude d’esclave une absence de “tares” ? Pour conclure que les deux sœurs Papin sont “totalement responsables”. Me Pierre Chautemps, un des avocats, demande alors au docteur s’il n’a pas communiqué à la presse déjà ses conclusions, en “affirmant leur infaillibilité”. Pas de réponse. Des détenues viennent témoigner et signaler des gestes et actes de Christine qui montrent son détraquement tournant au sadisme. Le docteur Lagre, aliéniste, cité par la défense, appuie dans ce sens. Après cette controverse entre médecins, Me Pierre Chautemps demande un supplément d’information que le procureur repousse ainsi que la cour. »

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10 juillet 2016 7 10 /07 /juillet /2016 05:41
Une audience lors du Procès de Germaine Berton (au centre, entre deux gendarmes). Photo :Albert Harlingue / Roger-Viollet

Une audience lors du Procès de Germaine Berton (au centre, entre deux gendarmes). Photo :Albert Harlingue / Roger-Viollet

Nos grands procès (1/9). 1923. Dans le climat délétère de l’entre-deux-guerres, la jeune anarchiste est jugée pour avoir abattu le royaliste Marius Plateau d’un coup de revolver. Elle voulait venger Jaurès et dénoncer l’Action française...

On est d’abord surpris par le degré de violence politique dans cette France de l’entre-deux-guerres. La salle du tribunal est remplie de policiers corrompus, de nervis armés de l’Action française (AF), de crapules toisées, de l’autre côté de la salle, par des militants communistes et anarchistes. La jeune anarchiste au banc des accusés est une récidiviste : trois mois de prison pour outrage et violence à agents, quinze jours pour port d’armes prohibées. « Des condamnations nullement infamantes ! » la défend le journaliste de l’Humanité. Du 18 au 24 décembre 1923, l’ancien avocat Marcel Willard couvre le procès de Germaine Berton pour notre journal. Cette militante de 20 ans a abattu Marius Plateau d’un coup de revolver, au siège de l’Action française. Plateau était dirigeant des Camelots du roi, branche militante de l’AF et instrument d’une politique de tumulte fasciste et royaliste. De son geste, Germaine Berton ne regrettera qu’une chose : s’être contentée d’un second couteau alors qu’elle voulait assassiner une figure. À la face de Charles Maurras, elle crachera en pleine audience : « J’aurais voulu vous tuer à la place de Marius Plateau ! »

La jeune femme est un étendard, un symbole à protéger

En 1923, la démocratie française est instable, hantée par la crainte d’un coup de force et sa justice est sous influence. Nous sommes quatre ans après l’acquittement de Raoul Villain, l’assassin de Jaurès. Les factions révolutionnaires et contre-révolutionnaires s’affrontent régulièrement dans les rues de Paris. La militariste Action française, avec « ses dénonciateurs, ses calomnies et ses agitateurs multicolores », bénéficie d’une inquiétante aura. En tirant sur Plateau, Germaine Berton dit avoir voulu protester contre l’occupation de la Ruhr, l’assassinat de Jean Jaurès et celui du journaliste anarchiste Miguel Almereyda, père du cinéaste Jean Vigo. Marcel Willard le dit sans détour : la jeune femme est un étendard, un symbole à protéger. Pour la soutenir, sont présents Marcel Cachin, Paul Vaillant-Couturier ou encore Léon Blum, qui condamne « les vendettas personnelles mais aussi judiciaires », pour mieux tacler l’Action française.

Après deux journées d’audience, la jeune femme est éclipsée par les débats. On l’oublie presque, son procès devient celui de l’Action française. Marcel Willard lui réserve ses plus belles piques militantes, chargées d’une verve acide sans doute acquise lorsqu’il portait lui-même la robe noire du barreau. Il note : « Maurras prend l’audace de se présenter comme un ami du prolétariat. Il fait devant les jurés ahuris de la surenchère démagogique et se perd dans un cours de sociologie contre-révolutionnaire », avant de pourfendre « ces émules du fascisme ultra-bourgeois ». À la barre, sont rappelées les innombrables ratonnades, agressions et attaques de locaux politiques dont sont coupables les militants de l’AF.

L’Action française cultive un incessant terreau de violence

Le journaliste de l’Humanité cite jusqu’aux adversaires catholiques et radicaux socialistes du PCF, « parmi les victimes venues flétrir la réputation de l’Action française : les Gohier, les Judet, les Sangnier, pour ne parler que de nos adversaires ». Car les royalistes frappaient tous azimuts, avec l’aide des Camelots du roi. Composés d’anciens militaires, les Camelots sont « une armée de métier », « un véritable organisme de mouchardage, de délation et d’agressions ». Coup de grâce : lorsque les Camelots produisent un policier comme témoin, il s’avère que c’est l’un de « leurs nombreux mouchards dans les forces de l’ordre ». « Si le ridicule tue, si l’odieux tue, l’Action française se sera suicidée au cours des débats ! » tonne Marcel Willard. L’objectif de l’Humaité est là : montrer que l’Action française cultive un incessant terreau de violence et prouver par la même occasion que le meurtre de Plateau est un légitime retour de bâton. La défense de Germaine Berton par le journaliste ne souffre aucune nuance, car ce serait reculer face au péril fasciste.

« Vous devez acquitter Germaine Berton pour tout ce qu’elle représente »

Au-dessus de ces débats plane l’ombre tant aimée de Jean Jaurès. Le fondateur de l’Humanité manque terriblement aux progressistes, dans ces années d’entre-deux-guerres. Il est partout évoqué, cité, loué, dans les papiers de Willard qui rappelle « l’acquittement odieux » de son assassin. Jugé pour homicide volontaire avec préméditation, « le patriote Villain » a été acquitté en 1919, au terme d’un délibéré qui n’a duré qu’une demi-heure. Au lendemain de cette guerre dont la France est sortie victorieuse, le tribunal a estimé que l’assassin de Jaurès n’avait pas commis de faute. « Vous devez acquitter Germaine Berton pour tout ce qu’elle représente, comme vous avez acquitté Villain. Un terrible compte est ouvert depuis la mort de Jaurès : vous devez acquitter sinon ce serait dire que, des deux corps couchés, c’est celui de Plateau le plus grand ! Vous devez acquitter dans un esprit d’apaisement, demain vous aurez le droit de sévir », plaide l’avocat de la militante anarchiste, le communiste Henry Torrès, futur mentor de Robert Badinter. Acquittée, elle ne devra verser qu’un franc à la partie civile. La camarade Berton sauvée, c’est la mémoire de Jaurès qui est vengée.

Dans l’Humanité du 25 décembre 1923 par Marcel Willard

« Germaine Berton n’est pas mue par un mobile égoïste. Elle ne frappe pas parce qu’elle aurait été blessée, soit dans sa sensibilité, soit dans son amour-propre. Non, son mobile est plus élevé : elle frappe pour une idée, pour venger la classe ouvrière, les assassinats de Jaurès et même d’Almereyda. Quant à la brochure ‘‘De l’acte individuel à l’acte collectif’’, elle est sans aucun lien. Car cet attentat n’a pas la moindre analogie avec cette brochure où il s’agit de frapper n’importe qui pour répandre la terreur. Germaine Berton a été l’interprète du sentiment des masses populaires qui sont exaspérées de subir les provocations impunies de l’Action française. Dans son livre Sylla et son destin, Léon Daudet fait une apologie de la délation et c’est la menace constante du fascisme. Devant tout cela la conscience populaire crie : Assez ! Pas de fascisme en France. »

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